29 février 2020

La Banque Mondiale encourage les Etats à ne pas taxer les entreprises

Post intéressant de C. Kenny et J. Sandefur qui critiquent vertement l'indicateur "Doing Business" de la Banque Mondiale. Cet indicateur mesure la facilité de faire des affaires dans différent pays (création d'entreprise, l'obtention d'un permis de construire, raccordement à l'électricité, transfert de propriété, etc voir la Banque Mondiale pour plus de détails). Le point des auteurs est que la construction de cet indicateur part d'un à priori idéologique considérant qu'une taxation faible est favorable au business et que ce point de vue peut-être particulièrement dommageable pour les pays en développement qui ont massivement besoin de lever des impôts pour financer les besoins importants en éducation, santé etc.

Selon ces auteurs, dans la mesure où les pays se concurrencent pour gagner des places dans ce classement, cet indicateur encourage une course vers le bas des taux d'imposition vers les paradis fiscaux et les pays exportateurs de pétrole.


Ils citent un peu outré le point de vue de Simeon Djankov sur ce point:
"...pensez-vous qu'au Mozambique, au Pakistan, dans la grande majorité des pays du monde, une hausse des impôts se traduirait non pas par de la corruption mais par des investissements et une plus grande efficacité? Non ! Ils vont voler cet argent".

En fait, les deux points de vue sont défendables. Les taxes, comme les dettes d'Etat, ne sont pas mauvaises ou bénéfiques en soi, tout dépend de ce que l'on en fait.

Si l'Etat est un Léviathan qui spolie le plus grand nombre pour le bénéfice d'une élite au pouvoir, inévitablement il est souhaitable qu'une pression à la baisse soit exercée sur ces nations. Si à l'inverse les Etats maximisent le bien-être économique de leur citoyen, une telle concurrence débouchera vers une sous provision de bien public défavorable pour tous.

Donc tout dépend de la fonction objectif des nations. Avec Jacques Le Cacheux, nous avions réalisé une revue de la littérature sur l'optimisation et la concurrence fiscale en Europe dans laquelle nous concluions que pour ces nations cette concurrence était sans doute dommageable, contribuant à une destruction des Etats Providences et à de forte injustices fiscales (les facteurs les moins mobile étant lourdement taxé, i.e. travail et entreprise locale). Le cas de l'Europe n'est cependant peut-être pas généralisable au monde. Ce que l'on peut regretter avec Kenny et Sandefur c'est que si la littérature théorique est très claire sur cette distinction Etat Léviathan/Bienveillant, les études empiriques et les indicateurs (dont celui de la Banque Mondiale), prennent rarement en compte cette dimension qui est pourtant essentielle. Au delà des taxes, ils faut regarder ce qu'elles servent à financer pour faire avancer ce débat (et la construction d'indicateur).





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