17 mars 2016

Behavioral Economics

Les sciences économiques se sont diversifiées au cours des trente dernières années et l'économie comportementale est sans doute l'une des disciplines qui s'est le plus développée sur cet intervalle. L'objectif a été de mieux comprendre les décisions économiques des agents pour amender et améliorer les enseignements de la microéconomie de base (optimisation, équilibre etc). L'économie comportementale a développé plusieurs analyses et méthodes qui sont désormais des disciplines à part entière telles que l'économie expérimentale, l'économie psychologique ou encore la neuroéconomie.

David Laibson and John A. List ont récemment écrit un papier intitulé "Behavorial Economics in the Classroom" qui résume les "principes" qui peuvent être tirés de ces analyses.

En résumé l'économie comportementale (prospect theory initialement) a montré que les décisions risqués sont évalués par les individus en termes de gains et de pertes par rapport à un point de référence (par exemple le revenu actuel), cette référence ou encore cette contextualisation de la décision peut conduire à de mauvais choix. De plus les agents n'évaluent pas les pertes de la même façon que les gains, ils surestiment l'occurrence des événements rares (e.g. terrorisme), sous-estime ceux dont la probabilité est grande et ils peuvent aussi avoir trop confiance en eux ou dans des choses qu'ils croient connaître. Les investisseurs ont par exemple tendance à avoir une préférence pour des investissements “familiers” et surestiment souvent la performance des firmes de leur pays (home bias). Les français détiennent ainsi beaucoup plus d'actions Renault que les américains (voir Rey et Coeurdacier (2011, JEL) pour une revue de la littérature sur le home bias financier).

Autre exemple (parmi bien d'autres), les américains n'épargnent pas suffisamment pour leur retraite, pourquoi? Est-ce un problème économique? d'information? Lorsqu'on leur pose la question, ils disent qu'ils ont conscience du problème et qu'ils vont justement augmenter leur épargne, mais pas aujourd'hui, demain. Le problème, c'est que demain, c'est toujours demain. Les individus ont clairement des problèmes de self-control, la façon dont il décompte l'effort futur est clairement incohérente avec leurs préférences et leurs choix d'aujourd'hui (voir les premiers travaux de Laibson sur l'hyperbolic discounting). Bref, la procrastination fait partie des traits comportementaux nous conduisant à réaliser de mauvais choix.

Les individus ont aussi tendance a valoriser beaucoup plus un bien qu'ils possèdent que ce même bien s'ils ne le possèdent pas, ou plus précisément ils ne sont pas prêts à payer grand chose pour augmenter leur dotation par contre ils seront très réticent à la voir diminuer (endowment effect de Thaler).

Enfin les interactions sociales jouent un grand rôle sur les décisions économiques des individus.

Ces nouveaux éléments dans l'analyse des comportements économiques ont enrichi les travaux de finance, d'économie du travail, du développement, etc.... DellaVigna (2009, JEL)Pesendorfer (2006, JEL), et Barberis (2012, NBER) offrent des revues de la littérature qui pourront vous intéresser.

Pour d'autres enseignements, notamment en économie publique, voir cette vidéo rassemblant plusieurs contributions. Tout d'abord Raj Chetty qui utilise des Big Data (1 milliard d'obs) pour comprendre les réactions fiscales des américains dans différents Etats au cours du temps, puis Olivia Mitchell sur la sécu américaine, Naomie Feldman sur une politique familiale (child tax credit) et Johannes Schmieder sur les allocations chômage. Here the power of the nudge!




David Laibson a aussi récemment participé à une revue de la littérature d'une autre science économique relativement nouvelle (et reliée à la précédente): la neuroéconomie.

Edit: léger souci pour répondre aux commentaires, je poste donc ici ma réponse:
McCabbe, Glimcher et Smith ont été les initiateurs et promoteurs de la neuroéconomie vers la fin des années 90 début des années 2000. Pour une histoire de la pensée en français de la neuroeco il y a cette thèse de Nicolas Vallois https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00765033/document

1 commentaire:

  1. Tiens, je n'avais jamais entendu parler de la "neuroéconomie", quand vous dîtes relativement nouvelle, vous situez ça à combien de temps environ ?

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