Comment évolue l’opinion publique ? Vaste question qui trouve des fragments de réponse dans l'agrégation des mots clefs que vous tapez sur vos moteurs de recherche. D'Amuri et Marcuci (2009) avaient ainsi amélioré les estimations du taux de chômage américain à l'aide de mots clefs tapés sur Google.*
Le Gaphique 1, extrait de leur étude, illustre le recours au moteur de recherche en tant de crise.
Graphique 1: Les recherches via Google sur
le chomage avant et pendant la crise de 2007
Aujourd’hui c’est une étude sur le lien entre conscience environnementale et crise économique qui nous fait bloguer, l'opinion publique sur la question environnementale étant pour le moins instable et en partie liée à l'activité économique. C’est un thème qui nous avait déjà intéressé lors de notre post sur le taux d’actualisation environnemental. A l’époque nous écrivions :
"La prise de conscience des citoyens concernant l'environnement et le réchauffement climatique était-elle éphémère? L'engouement pour "le vert" semble s'essouffler [...] il n'y a guère de quoi à être optimiste en ce qui concerne le changement climatique, la tragédie des communs s'applique... les interactions stratégiques entre pays débouchent sur un dilemme du prisonnier, la situation où tout le monde pollue est un équilibre de Nash (Copenhague). Les difficultés à se coordonner, à se lier les mains comme Ulysse face à l'appel des sirènes, semblent insurmontable tant la préférence pour le présent est forte et l'aversion au risque futur faible dans nos sociétés."
L’étude de Kahn et Kotchen (2010) va dans le même sens. Les auteurs étudient l’utilisation des mots clefs « changement climatique » et « chômage » au niveau des Etats américains depuis le début de la crise économique. Sans surprise ils observent qu’un fort taux de chômage réduit les recherches portant sur le changement climatique. Pour employer un vocabulaire un tant soit peu micro-économique, les auteurs considèrent que l’environnement est un bien de luxe, c'est-à-dire que la demande de ce bien diminue fortement lorsque le revenu diminue un peu.
On peut cependant regretter qu’un test de cette hypothèse n’ai pas été réalisé (quel genre de test auriez vous fait ?).
Conclusion
Les années de crise, le chômage de masse ont balayé les initiatives de développement durable. Aujourd'hui, comme hier (années 70 notamment), la raison économique risque de primer sur la raison environnementale alors même que ces deux notions ne sont pas contradictoires. L’opinion publique et donc l'intervention publique n’est pas stable sur la question environnementale, ce qui laisse présager (encore et hélas) de belles années d’inaction. Pendant ce temps le CO2 s'accumule...
F.
Notes de bas de posts
*Hal Varian fut le premier à mettre en avant ce type de recherche en tant que chef économiste de Google (pour un interview du big boss de la micro, c'est ici).
Références
- Kahn, ME and MJ Kotchen (2010), “Environmental Concern and the Business Cycle: The Chilling Effect of Recession”, NBER Working Paper 16241.
J'avais loupé ça et ma grand-mère ne comprendra rien...
RépondreSupprimerC'est intéressant comme piste. Je savais pas qu'il y avait des papiers dans ce sens là aussi. Merci monsieur le Professeur...