Mais qu'ils sont méchants ces gens (majoritairement des
économistes)...Il n'empêche, je me suis senti concerné, pas
vraiment par le passage "gains de productivité" mais pour avoir beaucoup hausser les épaules. Pourquoi sauver les médias? Parce qu'ils sont
en crise? Parce que la qualité de l'info diminue? Mouais... Obsession du déclin
et de la catastrophe... encore et toujours. Zola, sans Twitter et les chaînes d'info en continu, flippait déjà:
"Le flot déchainé de l'information à outrance a transformé le journalisme,
tué les grands articles de discussion, tué la critique littéraire, donné chaque
jour plus de place aux dépêches, aux nouvelles grandes et petites, aux
procès-verbaux de reporters et des interviewers".
Pourquoi donc faut-il sauver les média? Parce qu'ils fournissent
l'info? L'auteure nous le dit avec autorité "Rappelons donc une évidence:
sans journalistes, il n'y a pas d'information". Je rehausse les épaules,
avec certains journalistes, il y a des infos qui n'en sont pas. Oui, mais alors
attention, Julia Cagé nous parle des "vrais" journalistes. Mais qui
sont-ils? Quel pourcentage? Comment ce pourcentage évolue t-il? Aussi
lorsqu'elle écrit "Qu'est-ce qui distingue un journaliste - un vrai - d'un
blogueur du dimanche?" j'aurais tendance à répondre, qu'en l'absence de toute quantification et définition du "vrai" journaliste (et du "blogueur du dimanche"), il n'y a pas de grande différence. Bref, je reste persuadé que ce livre aurait gagné à définir et analyser davantage les "vrais" journalistes, ceux qui nous font un peu rêver, car sans ces journalistes du haut de la distribution, on a pas vraiment envie de sauver les médias.
De plus, tant qu'on y est, pourquoi ne pas parler du bas de la distribution, car au delà du danger lié à une accaparation de l'info par de riches millionnaires, il y a un autre danger, tout aussi important pour la démocratie: les gens s'informent de plus en plus sur des médias "alternatifs" qui désinforment totalement, mentent outrancièrement, attisent la haine etc... Vous pouvez bien penser que les deux choses sont reliées, peut-être, en partie, mais je pense qu'une étude spécifique de ces médias (et une réflexion sur comment les discréditer) est aussi importante pour savoir comment sauver "les" médias et préserver une démocratie éclairée. Les intellectuels fr ont trop tendance à mépriser la fachosphère du net, mais ce n'est pas en l'ignorant qu'elle n'existe plus, pour sauver les médias il aussi faut s'attaquer à cet autre mal.
De plus, tant qu'on y est, pourquoi ne pas parler du bas de la distribution, car au delà du danger lié à une accaparation de l'info par de riches millionnaires, il y a un autre danger, tout aussi important pour la démocratie: les gens s'informent de plus en plus sur des médias "alternatifs" qui désinforment totalement, mentent outrancièrement, attisent la haine etc... Vous pouvez bien penser que les deux choses sont reliées, peut-être, en partie, mais je pense qu'une étude spécifique de ces médias (et une réflexion sur comment les discréditer) est aussi importante pour savoir comment sauver "les" médias et préserver une démocratie éclairée. Les intellectuels fr ont trop tendance à mépriser la fachosphère du net, mais ce n'est pas en l'ignorant qu'elle n'existe plus, pour sauver les médias il aussi faut s'attaquer à cet autre mal.
On trouve la réponse au "pourquoi" sauver les médias dans les chapitres 2 et 3, il faut sauver les médias parce qu'ils sont
essentiels à la démocratie. C'est assez convaincant, il y a une
multitude d'exemples, le Tea Party qui a la main sur Fox, des journaux locaux
qui disparaissent aux USA et qui laissent une corruption locale non couverte...
et l'on repense à toutes ces affaires qui sont sorties en France grâce aux médias.
En bref, on finit par adhérer. Le livre est bien documenté,
il y a une multitude de stats qui intéresseront tous ceux qui veulent en
savoir plus sur ce secteur. Pour mes étudiants en microéconomie, c'est un ouvrage
qui permettra d'illustrer plusieurs concepts (sans aucune équation!). L'information
contenue dans les journaux était par le passé privée, elle est devenue un bien public avec l’avènement d'internet.
Un bien public est un bien qui a perdu ses caractéristiques d'exclusivité et de
rivalité. Il ne peut plus être rentable. Julia Cagé nous décrit plusieurs expériences
dans divers pays visant à rendre les journaux plus profitables. Le chapitre 3,
dernier chapitre de ce petit ouvrage, est celui qui m'a le plus plu.
L'auteure illustre comment le mode de gestion influence la fourniture d'information
et c'est passionnant. Elle présente notamment les méfaits des introductions en
bourse, comme celle du Chicago Tribune qui a vu sa valorisation augmenter mais
moins vite que son chiffre d'affaire, entraînant inévitablement une pression
sur les coûts et une réduction des dépenses (=moins de journalistes). De plus,
pour être rentable une stratégie de niche visant à cibler les lecteurs les plus
aisés s'est faite au détriment d'un accès pour tous à l'information avec une
hausse des tarifs des abonnements. Pire, certains sujets d'actu, étant
considérés comme de faible intérêt pour cette classe aisée, ne sont plus
traités. Après avoir résumé d'autres
modes de financement et de contrôle, Julia Cagé en vient à sa proposition d'un
nouveau statut. Elle propose un mode de gestion à but non lucratif où les apports
en capitaux seront pérennisés et où les droits de vote des gros actionnaires
seront minorés par rapport à des petits actionnaires tels que les journalistes
et les lecteurs ayant fait du crowdfunding. Excellente idée!
Fabien Candau
Référence: la citation de Zola provient de l'ouvrage de July
"Dictionnaire amoureux du journalisme" qui adopte une intéressante perspective historique
et personnelle du journalisme.
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